Alors qu’elle s’apprête à prendre l’avion pour retourner dans sa ville natale, Marjane se remémore son passé là-bas. À travers ses souvenirs, elle replonge dans l’histoire difficile et chaotique de l’Iran.
Avec son réalisme stylisé inspiré du néoréalisme italien et de l’expressionnisme allemand, Persepolis est rapidement devenu un monument qui a ouvert la voie aux œuvres mêlant Histoire, récit personnel et humour. Il a également créé une nouvelle passerelle entre cinéma et bande dessinée. On a là une de ces œuvres qui ont marqué l’histoire du cinéma d’animation.
Inspiré de la bande dessinée autobiographique de Marjane Satrapi, Persepolis explore seize ans de la vie de l’autrice. Téhéran, 1978, Marji a 8 ans et veut devenir le futur prophète. Paris-Orly, au présent, Marjane hésite devant le grand panneau d’affichage qui indique Téhéran. Héroïne pleine de verve, de courage et d’enthousiasme, Marjane est de ces personnages qu’on n’oublie jamais. Éprise de liberté, rebelle à tous les âges, désireuse de vivre, elle est le cœur et la voix du récit. À travers elle, le spectateur découvre la solidarité familiale, les violences du régime et l’amour adolescent. À ses côtés, du noir et blanc à la couleur, on grandit, de départs en deuils, de deuils en retrouvailles.
L’Histoire iranienne et celle de Marji se déroulent sous nos yeux et se mêlent, à la fois personnelles et universelles : la dictature du Chah et sa chute, la révolution, l’instauration de la République islamique, la mort de son oncle, la guerre entre l’Iran et l’Irak, l’exil à Vienne… À hauteur d’enfant, on assiste aux conversations d’adulte. L'animation, souvent proche des ombres chinoises, facilite la confrontation à un passé encore récent et très violent. Aux drames quotidiens répond l’humour, très burlesque voire cartoonesque, appuyé par le montage énergique.
Film humaniste à la portée universelle, Persepolis est une œuvre riche et marquante, à découvrir sans hésiter.
Lire la suite MasquerUn film inspiré de la bande dessinée
À l’origine, Persepolis est une série de bandes dessinées autobiographiques en noir et blanc, écrite par Marjane Satrapi et publiée de 2000 à 2003. Initialement publiée en quatre volumes, elle retrace l’histoire de Marjane de son enfance pendant la révolution iranienne à son entrée dans la vie adulte en Europe. En 2011, le duo Vincent Paronnaud et Marjane Satrapi adapte une seconde œuvre de l’autrice sur grand écran : Poulet aux prunes. C’est l’histoire d’un violoniste iranien, à Téhéran en 1958, qui perd le goût de vivre lorsque son violon se brise. En attendant la mort, il plonge dans des rêveries et souvenirs de jeunesse.
Un film au casting prestigieux
Pour donner corps à ses personnages, Marjane Satrapi s’est tournée vers des actrices et acteurs à la renommée internationale. Catherine Deneuve joue la maman et Danielle Darrieux, la grand-mère. Chiara Mastroianni est Marjane. C’est d’ailleurs elle qui interprète le célèbre morceau du groupe Scorpions, Eye of the Tiger, lorsque Marja reprend goût à la vie. Fun fact : Catherine Deneuve est la mère de Chiara Mastroianni ! Pour le doublage anglophone, ce n’est rien moins que Sean Penn (le père), Iggy Pop (l’oncle) et Gena Rowlands (la grand-mère) qui prêtent leur voix aux personnages du film. Persepolis s’est vu décerner le Prix du Jury lors de la 60ᶱ édition du Festival de Cannes, en 2007. L’année suivante, il remporte l’Oscar du meilleur film d’animation, à Los Angeles, aux États-Unis.
Un film controversé
La République islamique d’Iran a jugé que le film était « un tableau irréel des conséquences et des réussites de la révolution islamique » et en diffuse une version censurée. Persepolis est également interdit de diffusion au Liban. Cette interdiction finira par être levée. Programmées à la Cinémathèque de Tanger, au Maroc, les projections sont annulées à la dernière minute et remplacées par Séminaire du manifeste des voleurs et Une vie de chat.
Des bandes dessinées engagées
C’est le roman graphique Maus d’Art Spiegelman (1991) qui a inspiré Marjane Satrapi par sa manière d’aborder les drames historiques et personnels avec humour. Il retrace l’histoire de l’Holocauste à travers le récit du grand-père de l’auteur. Dans la même veine des bandes dessinées mêlant Histoire, quotidien et humour, Le Chat du rabbin de Joann Sfar (2011) et L'Arabe du futur de Riad Sattouf (2014) sont également des œuvres notoires. Le premier se déroule en Algérie, tandis que le second s’intéresse à la Libye et à la Syrie.
En apprendre plus sur Persepolis
Le dossier pédagogique sur le film produit par le Centre national du cinéma et de l’image animée est disponible par ici. Il contient de nombreuses informations sur la réalisatrice et le réalisateur, l’histoire iranienne et le dessin animé.
Persepolis est recommandé à partir de 11 ans. Le film aborde des temps troublés de l’Histoire iranienne (guerre, répressions, dictature) et explique, bien qu’à travers le regard de la jeune Marjane et la douceur de l’animation, les violences subies par le peuple iranien. Quelques gros mots se sont également glissés dans la bouche des protagonistes.